Le week-end dernier, Davide Sapienza, géopoète, et Robert Weis, géologue, ont organisé un camp géopoétique dans la localité tranquille et isolée de Lasauvage. Niché dans les vallées du sud de la région de Minett au Luxembourg, ce lieu offrait un exutoire poétique parfait pour les deux spécialistes qui ont présenté leurs trouvailles sur le passé minier industriel du Luxembourg et ont mis les jeunes participants au défi de s’ouvrir à l’expérience de cet environnement unique d’une manière plus personnelle et émotionnelle.
Le vendredi, les invités ont été accueillis au camp par un barbecue de bienvenue ensoleillé. Ce soleil s’est rapidement transformé en pluie le jour suivant. Pourtant, le groupe ne s’est pas laissé décourager. Au contraire, les sentiers et les paysages naturels semblaient s’animer et la présence inquiétante des nuages ajoutait au cadre mystérieux de la région, dont le nom vient de la « sorcière » à l’esprit libre et fou, qui avait habité solitairement la forêt bien des années auparavant. En s’inspirant de cette légendaire femme sauvage, le groupe s’est donc libéré de ses inhibitions et s’est laissé guider dans des randonnées sauvages et merveilleuses à travers le bassin minier du Fonds-de-Gras. Il ne s’agissait pas d’une visite guidée classique de la nature, mais plutôt d’un voyage ponctué de périodes de marche silencieuse de 10 minutes ainsi que de plusieurs pauses pour la lecture de textes géopoétiques par Davide.
Ces moments du voyage avaient pour but d’encourager les participants à s’imprégner de leur environnement immédiat et à créer pour eux-mêmes une histoire émotionnelle liée à cet espace et à ce moment. Qu’il s’agisse de l’entrée d’un tunnel minier, de la respiration d’un air frais sur leur corps ou d’un petit étang scintillant rempli d’insectes vivants, ce sont des moments de réflexion puissants que les participants ont savourés et qui ont été brillamment complétés par les notes scientifiques de Robert sur le site. Ces notes sur l’histoire géologique et industrielle de la région complétaient parfaitement l’histoire émotionnelle que les participants étaient en train de créer dans leur esprit.
Le soir, le groupe s’est réfugié dans un bistrot local pour échapper à la tempête en attendant le bus qui le ramènera à l’auberge de Lasauvage. Une fois de retour à l’école transformée en auberge, le groupe a dégusté un plat de spaghetti bien chaud, avant de poursuivre la nuit dans un vieux bistrot endormi à proximité, puis de la terminer sur le terrain de sport local où le groupe a chanté et dansé jusqu’à minuit passé.
La matinée du dernier jour s’est poursuivie comme la précédente, tandis que l’après-midi, les rênes ont été reprises par Lise Landrin, géographe de l’Université du Luxembourg travaillant dans le domaine de la « Géographie des émotions ». Dans les jardins communautaires de Lasauvage, Lise a dirigé le groupe à travers deux exercices de réflexion et de sensorialité. Dans le premier, les membres ont été invités à se mettre par deux, une personne devant guider l’autre dans une expérience sensorielle à travers le jardin tandis que son partenaire était aveuglé en fermant les yeux. Les partenaires ont échangé leurs rôles et ont finalement discuté de leurs parcours respectifs en dessinant chacun une carte de leurs expériences.
Comme dernier exercice du camp, chacun a été invité à choisir un site dans le jardin qui lui rappelait un souvenir spécifique de son passé et a été encouragé à écrire un court texte sur ce souvenir, en commençant par les mots : « Je me souviens quand… ». L’aventure du camp géopoétique s’est ainsi terminée en beauté. Le groupe s’est retrouvé avec une véritable essence de ce qu’est la géopoétique : une histoire à travers des vies et des émotions, à travers le temps et l’espace et dans l’au-delà. Dans le monde des sentiments et des expériences de la nature et de sa propre personne, à venir dans le futur.